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Le journal de Geneviève Latour
19 avril 2017

Charles Pasqua

Charles Pasqua

Lorsqu’en novembre 1961 , je fus engagée par la Sté Ricard pour devenir la secrétaire du Patron, je dus faire un stage de quinze jours au siège social  de la société , à Marseille. Dire que j’ai été reçue les bras ouverts par l’ensemble du personnel des bureaux serait excessif. Une Parisienne promue à ce poste fort honorifique, alors que de bonnes secrétaires de direction , Marseillaises de surcroît, enviaient le poste ?  C’était inconcevable…

 Seul , Mr Pasqua, alors directeur des Ventes pour la région du Midi , m’accueillit dans son bureau, avec beaucoup de bonhomie. Connaissant en partie mon passé dans les  théâtres parisiens , il me serra main et me dit, avec un  accent  marseillais inégalable : «  Madame Latour, la vente, c’est de la ‘’Caumédie’’.. » Il me fit asseoir et , se transformant en  un sosie de Fernandel, il me joua différents  sketchs, concernant tout d’abord  le comportement des  cafetiers: celui qui aimait le Ricard et en poussait la  vente, celui qui  le détestait et évitait d’en servir et celui qui,   n’ayant aucune de préférence,  offrait le pastis qu’on lui demandait. Selon le même procédé , M. Pasqua  enchaîna  sur l’attitude des clients : l’amateur de Ricard, l’ennemi du produit et l’indifférent . Il ne s’en tint pas là et m’interpréta pour finir  le bon et  le mauvais représentant.

Son numéro terminé ,il parut  désolé : « Ah ! quel dommage que vous n’ayez pas été là , le mois dernier, vous auriez assisté à la réunion des agents de vente…enfin cela ne fait rien, je vais vous faire entendre la bande ». Ainsi,  j’ai écouté  son  ancien discours sur magnétophone. Après quelques envolée lyriques, il terminait son allocution par cette phrase inoubliable :

 «  Jésus-Christ a promis, aux hommes, le Bonheur  dans le ciel,  Paul Ricard leur donne sur la terre ».

 J’avoue que j’ai été assez bluffée…

 Quelques mois plus tard , alors que j’étais en fonction, j’ai eu l ‘honneur d’être conviée à la  nouvelle réunion officielle des représentants, agents généraux  et directeurs  commerciaux de la Société : plus d’une centaine de personnes… Tous des hommes !!! Chacun portait un  blouson rouge avec un écusson ‘’Ricard’’ sur la poitrine. Après le discours, toujours aussi enflammé de Charles Pasqua,   la main sur la couture du pantalon, le regard fixé droit devant eux,  les assistants entamèrent à l’unisson l’hymne Ricard , composé  sur la musique de ‘’L’Ave Maria’’:

             

                                            ‘’ Oh Toi ! sainte Marthe [1]

                                            ‘’ Reine du Paraclet,    

                                            ‘’ Avant qu’on ne parte,

                                           ‘’ Sers  un Ricard bien frais.

 

                                                         Refrain

                                             ‘’ Ave, ave, ave cinq volumes d’eau !

                                             ‘’ Ave, ave, ave cinq volumes d’eau !

 

                                            ‘’ Aux hypocondriaques 

                                            ‘’ Il redonne la joie,     

                                            ‘’ Il prévient les attaques

                                            ‘’ Et les crises de foie !

 

                                                   

                                                              Refrain

                                              ‘’ Ave, ave, ave cinq volumes d’eau   !

                                              ‘’ Ave, ave, ave cinq volumes d’eau.   !

 

La cérémonie terminée, ‘’les vainqueurs de la soif’’ s’en allaient gaillardement rendre visite aux bistrots les plus proches. Dès l’entrée de ses troupes, le  futur Ministre de l’Intérieur , s’adressant au patron,  annonçait : « A la Mienne ! à la Tienne ! à la Sienne ! à la Nôtre ! à la Vôtre ! à la Leur ! » ,  ce qu’on pouvait traduire par «  six Ricard pour chacun »

 

Apparemment cette manière de diriger était excellente, puisqu’en 1961, année de mon engagement, il avait été vendu II.000.000 de bouteilles ,  l’année suivante 16.000.000 et la courbe ne cessait de grimper.

 

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